Le terme "affrontement" convient bien pour caractériser les rapports entre partisans de l'usage de la seule langue française à l'école et à l'intérieur des bâtiments publics et les défenseurs de la langue bretonne. Ainsi, à Gourin, lors du Congrès de l'Union Régionaliste bretonne, tenu fin septembre 1904, au moment même de la fondation d'Ar Bobl, les choses tournent mal. L'URB, fermement catholique, attachée au costume breton et à la langue bretonne, souhaite l'autonomie de la Bretagne. Parmi ses membres figurent maints notables: députés, conseillers généraux, maires, notaires, prêtres et, bien évidemment, en tête des celtophiles, François Jaffrennou.
A la fin de leur congrès, les régionalistes défilent, musique en tête, dans la grande rue de Gourin. Voici le récit de la Dépêche de Brest du 2 octobre 1904:
"Tout avait été pacifique jusqu'à présent. Quelques buveuses de profession, il en est partout, marchant d'un pas mal assuré, avaient bien bousculé, par ci, par là, les uns ou les autres. Hélas ! hier soir, tout a changé. A peine la retraite aux flambeaux, dirigée par M. Paul Bouar, notaire, est-elle sortie, que le chant de la Marseillaise a commencé, suivi de celui de l'Internationale.
Au bas de la Grand'Rue, lorsque la musique a rebroussé chemin, celle-ci s'est disloquée pour repousser les manifestants. Une bousculade s'est produite et le trottoir de Mme Veuve Poulichet a été envahi. Le brigadier de gendarmerie, dont nous avons admiré le sang froid, a réussi à protéger M. P. Stenfort, contre lequel on s'acharnait surtout, parce qu'il était considéré comme le directeur de la manifestation.
Un accord momentané a semblé s'établir et tout le monde a chanté l'hymne national. Mais, dès que les musiciens ont repris leurs places, les cris de "Hou ! hou! la calotte ! la calotte !" ont retenti. A partir d'alors, pendant toute la durée de la retraite, çà a été un tapage assourdissant. On a crié:"a bas Combes ! Vive la liberté ! Vive Combes ! Vive la République" et surtout, avec acharnement:"Hou ! hou ! La calotte ! La calotte !" et différentes épithètes contre certaines personnes de la localité. Grand'Rue et sur la place, les femmes elles-mêmes s'en sont mêlées. Un musicien, M. Huet, a été frappé et a le nez contusionné".
" Paris – La langue bretonneA la Chambre - M. l'abbé Gayraud: « Ainsi, il est permis de prêcher en provençal et non en breton: il faut le dire ! » |
Ar Bobl, n° 11, 3 décembre1904 |
Quoique non-bretonnant, l’abbé Gayraud, qui dut son élection aux curés de campagne du Bas-Léon, ne peut que défendre l’utilisation de la langue quotidienne de ses mandants.
Alors que le provençal n’est pas considéré par les « Jacobins » parisiens comme une langue politiquement dangereuse (le Midi, occitan ou provençal, vote très largement pour la République une et indivisible), le breton est considéré par les Républicains comme un obstacle à la pénétration de la devise : « Liberté, égalité, fraternité » et à la compréhension par les électeurs bretons de l’excellence, hautement affirmée sinon démontrée, du programme républicain.
« Comme en pays conquis. Il ne se passe pas de mois sans que nous n’ayons à enregistrer la suppression de traitement de prêtres bas-bretons pour usage de la langue régionale dans une église. C’est un devoir pour tous les Bretons, à quelque parti qu’ils appartiennent, de protester avec nous contre ces mesures tyranniques que des Prussiens ne désavoueraient pas. […] C’est le Breton que l’on vise, c’est l’éternelle haine du Franc contre le Breton qui se rallume sous la dictature de Komb. C’est la séculaire persécution contre tout ce qui touche à notre race et qui ne prendra fin qu’avec la France elle-même […] Gall brein, an diaoul zo var e gein (1) »
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[1] « Français pourri, que le diable te dévore le dos ! » Ar Bobl, n° 16, 7 janvier 1905 |
Le 16 juin 1903, Combes, Chef du gouvernement, fait adopter par une Chambre dont la majorité des députés est nettement de gauche, la loi interdisant de prêcher et d’enseigner le catéchisme en breton. L’épiscopat breton, des maires et des conseillers généraux s’élèvent énergiquement contre cette mesure. Bien des prêtres choisissent de désobéir. En 1903, ont maille à partir avec les autorités (suspension de traitement) des prêtres de Loqueffret, Collorec, Plonévez-du-Faou…qui ont passé outre aux avertissements du Sous-Préfet de Châteaulin.
"Ministère de l'Intérieur - Commissariat aux chemins de fer - Emploi abusif du breton dans les sermons et le catéchisme, commune de Spézet.
Les dix prêtres du Poher finistérien dont le traitement est suspendu sont:
en 1902: 1er octobre: Roué, recteur de la Feuillée; Corbel, recteur de Loqueffret; Cloarec, recteur de Brennilis
En 1902-1904, les 87 prêtres finistériens touchés par la « suspension » de leur traitement, le sont pour n’avoir pas utilisé un brin de français dans leurs fonctions. Cette mise à l’index de la langue nationale exaspère une certaine presse parisienne, ainsi la Lanterne, la feuille d’un Rochefort dont la trajectoire politique est particulièrement sinueuse (républicain sous Badinguet, bonapartiste en 1888, nationaliste en 1904) :
« Ce que les prêtres défendent dans le breton, c’est leur prestige de sorcier, avec les avantages qu’il comporte : respect superstitieux d’une religion grossière, dons en argent et en nature, influence électorale du curé sur ses paroissiens, puissance morale de l’Eglise et bien-être matériel des prêtres.. Quoi que décident les ratichons, ces scandaleux sermons doivent cesser, les ensoutanés qui ne voudront pas être cassés aux gages, se résigneront à parler la langue française à des paroissiens qui, bien que cagots bretons, sont pourtant citoyens français […] Les Bretons n’ont rien compris à la grandeur des idées républicaines ; qu’on leur fasse voir à leurs dépens que la République est du moins assez forte pour se faire respecter […] »
(cité par Fanch Broudic, L’interdiction du breton en 1902, la IIIe République contre les langues régionales, Coop Breizh, Spézet, 1997)
Les prêtres bretonnants sont agonis d’injures : « prêtres démagogues », »rebelles ». Combes lui-même rappelle les termes du contrat qui lie l’Eglise et l’Etat : « Le prêtre […] est fonctionnaire et fonctionnaire français [… Il émarge au budget de l’Etat […] Le ministre des Cultes a le devoir de rappeler ce prêtre à l’accomplissement régulier de ses fonctions quand il s’en écarte … »
( Débat du 16 janvier 1903 à la Chambre des Députés) .
"Ar Journalo bro Eur Judeo, hanvet Crémieux, en doa lavaret eun den d'e genvroiz: "Kemerit krog ar journalou, hag ho pezo peurrest". Ama eo ar c'hontrol. Ar binvidigien a zo eneb ar brezonek dre m'a n'ouzont ket anezan; ar beorien a zo eneb ar brezonek dre m'a deuz mez gantan an dud entre na raint ket kalz ar forz, mes gwell eo gallek gantê, koulskoude aesoc'h eo da lenn !" |
"Les Journaux- Un juif, nommé Crémieux, disait un jour à l'un de ses compatriotes: "Emparez-vous des journaux et le reste vous appartiendra !". Là réside le levier de la domination. Les riches sont hostiles au breton parce qu'ils ne le connaissent pas. Les pauvres lui sont hostiles parce que beaucoup ont honte de n'avoir pas fait beaucoup d'efforts en sa faveur: ils lui préfèrent le français, plus facile à lire" |
Ar Bobl, n° 29, 8 avril 1905 |
Traduction: Jean Yves Michel, août 2012 |
"Scrignac - Campagne électorale: "M. Nicol cause en breton aux applaudissements des instituteurs et de leurs élèves. Il y a quatre ans, lorsque M. Corbel causa en breton à Scrignac, les mêmes pédagogues inconséquents le moquèrent et réclamèrent du français" |
Ar Bobl, n° 84, 28 avril 1906 |
« Les instituteurs n’ont pas toujours su le parti qu’ils pouvaient tirer d’une langue adaptée à l’esprit de la population et dans laquelle les enfants avaient commencé à penser. Ils ont cherché à la proscrire : mieux vaudrait l’enseigner rationnellement quand cela est possible. Il y a toujours avantage à posséder deux langues et les Bretons perdraient beaucoup de leurs qualités natives, de leur originalité d’esprit si leur langue natale venait à disparaître » |
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Extrait du discours prononcé par M. Guieysse, député du Morbihan, comme Président du Congrès de la ligue de l’Enseignement primaire (1898) . Ar Bobl, n° 216, 13 février 1909 |
Suis-je l'ennemi des instituteurs ? Je m'honore d'avoir été instruits quatre années par de bons et braves instituteurs laïques dont j'ai vu le dévouement à la besogne et auxquels on ne pouvait reprocher qu'une chose: c'était de professer contre le breton à l'école une haine farouche qui se traduisait par le symbole. Notez que ces instituteurs connaissaient bien le breton, qu'ils le parlaient en dehors des classes, qu'ils le lisaient très bien, qu'ils l'écrivaient peut-être mais, esclaves d'un consigne centralisatrice idiote, ils se faisaient les étrangleurs de cette langue lorsqu'il s'agissait d'enfants confiés à leurs soins" |
Ar Bobl, n° 145, 6 juillet 1907 |
Keraez - Gouel ar Républik Ar Gouel-ma a ia var dristaat: beb bla ve nebeutoc'h a dud ha ga a plijadur . Eur program a ve gret, gwir eo, mez na ket heuillet. Dimeurz da noz n'eus bet dansou na tantad. An dennadek ball-trap dimerc'her vintin a zo bet gret div'heur goude an heur merket. A pez a weler sklet dre gement-ma, eo kaër zo voti sommou braz da zevel jeuiou, den na oar dre belec'h aint e meaz. Pa oaint et d'ar banket dimerc'her da greizde, allaz, ne oaint nemed ugent deuz tol hag a zelle trist an eil deuz egile. Evuruzamant, o doa naon, hag o deuz gret enor d'ar c'hig maout ha d'ar gwin fin. Marteze ar brederien a reaz memez forz pokou d'ar weren rag var dro fin lein, e savaz eur c'houad chao. Eur paotr iaouank deuz hon mignoned a oa gouliet digantan kana eur son vrezonek. A boan en doa dispaket ar poz kenta, ma kriaz eun aotrou deuz ar c'honsaill: "Je ne comprends qu'on chante en breton le 14 juillet". Dustu, draill a zavaz, darn a vond a du gant ar gallegacher ha darn all o huchal warnan. Ar banket a echuaz e-kreiz ar jolori. Alia reomp ar c'honsailler-ze hag a neus kemend all a zisprij evid langach e dud da lenn mad artikl Loiez ar Floc'h a zo en penn ar gazetenn. |
Carhaix - Fête de la République Cette fête est de plus en plus triste: chaque année, l'assistance diminue, le plaisir aussi. Il est vrai qu'un programme a été bâti, mais il n'a pas été suivi. Mardi soir, ni danses ni feu de joie. Le tir au ball-trap, mercredi matin, a commencé deux heures après l'heure. Ce que l'on voit clairement dans tout ceci, c'est qu'on a beau consentir en conseil municipal à dépenser de grosses sommes pour mettre sur pied des jeux, personne ne sait où l'argent est allé. Au banquet du mercredi midi, hélas, seulement vingt personnes, d'humeur chagrine. Heureusement, elles avaient faim et firent honneur à la viande de mouton et aux vins fins. Peut-être même qu'ils avaient beaucoup choqué leurs verres parce que, vers la fin du repas, une partie des convives fit du tintamarre. Il fut demandé à un jeune homme de nos amis de chanter en breton. A peine avait-il chanté le premier couplet, qu'un membre du conseil municipal s'écria:"Je ne comprends pas qu'on chante en breton le 14 juillet". Aussitôt, un désordre s'éleva, les uns approuvant le francophile bretonnophobe, les autres l'insultant. Le banquet s'acheva dans le chahut. Nous conseillons à ce conseiller et tous ceux qui méprisent la langue de leur entourage de bien lire l'article de Loeiz ar Floc'h, qui se trouve en première page ce ce journal. |
Ar Bobl, n° 238, 17 juillet 1909 | Traduction: Jean Yves Michel, août 2014 |
"Ar Bobl a zo bet savet evit difenn hor iez hag, enn hevelep amzer, hor feiz hag hor giziou. Wara ar mëz, dreist holl, e ve reuzeudik stad ar Vretoned, rag ann iliz a zo evidomp a leac'h santel hag ivez al leac'h ma'ch en em ziskuizomp ar muia goude al labour bounner, enn eur gana kanaouennou e pad an oferenn hag ar gousperou. Petra rafemp da zul ma neve ket an iliz digor ?" | "Le "Peuple" a été créé pour la défense de notre langue et, dans une période de ce genre, de notre foi et de nos coutumes. A la campagne surtout, dans l'état misérable dans lequel sont confinés les Bretons, car l'église est un lieu sacré et le lieu où nous nous reposons le mieux après les durs travaux, à travers le chant des cantiques durant la messe et les vêpres. Que ferions-nous le dimanche si l'église n'était pas ouverte ?" |
Ar Bobl, n° 13, 17 décembre 1904 | Traduction: Jean Yves Michel, juillet 2012 |
« Poème adressé par Yvonik Clec’h (bet maër Landelo) à François Jaffrennou
“C’hwi ho peus ive nerz kalon Da zifenn ar relijion Eneb d’ar skridi bilimus Ha d’ar gazetenn fleurius Skoët atao var an dud fall A glask digristena Bro C’Hall Ha ho po, Aotrou Jaffrennou Eur plas kaër ebarz an nenvou” » |
« Vous avez aussi le grand courage De prendre la défense de la religion Et de vous élever contre les écrits venimeux Et les journaux sournois Stigmatisez les méchants Qui cherchent à déchristianiser la France Et vous aurez, M. Jaffrennou, Une place de choix dans les cieux » |
Ar Bobl, n° 68, 6 janvier 1906 |
Traduction: Jean Yves Michel, juillet 2012 |
Kergloff - Eur sarmon vad Disul en ofern bred, aotrou Person Kergloff a neuz prezeget divar benn ar brezoneg. Lavaret a neuz d'ar gristenien: "Brezonek zo, brezonek a vo . Mez d'ar re a zianzao o iez hag o bro !" Trugare d'ar person kalonek-ze evid e c'hiriou mad ! |
Kergloff - Un bon sermon Dimanche, lors de la messe basse, Monsieur le Recteur de Kergloff a prêché au sujet du breton. Il a dit aux fidèles: "Le breton est, le breton sera ! Honte à ceux qui renient leur langue et leur pays !" Merci à ce recteur courageux pour ses bonnes paroles ! |
Ar Bobl, n° 302, 8 octobre 1910 | Traduction: Jean Yves Michel, octobre 2012 |
Maro eur gwir Breizad Eur c'helou trist a zo deut d'ar wir Vretoned dilun: an aotrou Gwill Ar C'hoat, ar skrivanier breizad anazevet mad, a oa maro disul diveza, an deiz kenta a viz meurz, en e vision Tremel, d'an oad a 69 bloaz. Gwill Ar C'hoat a oa beleg protestant en Tremel. Er barroz-ze e oa ganet ar 27 a viz eost 1845. A vihanik en doa disket beza eur Brezoneg mad en skol e vam, merc'h d'ar fablenner Gwill Ricou, ive euz Tremel. Arru krennard, he oa kaset da ober studi da Vro-Saoz gant ar brotestanted, ha pa oa resevet da bastor, e oa digaset gant "Breuriez ar Bibl" da Vro-Dreger evid skigna an Aviel etouez ar Vretoned, e genvroiz. Gwill Ar C'hoat, aez eo komprenn, a gavaz diaezamanchou, trubuillou ha meur a hini a vije bet fallgalonet. Mez ar greden en doa da Jezuz-Krist hag ar gourach en doa da zerc'hel mad groui, en Tremel, eun ti-skol, eun hospital hag eur chapel, elec'h e laboure evid e relijion. Mez an Avieler-ze a oa dreistholl eur madoberour. En gwirionez (hag ar re a stourmaz outan dre zever hen anzav awalc'h), eur galon vad a zen a oa, eur gwaz leal, ha na gaver droug a-bed -nemed mad- graet gantan tro war dro d'ezan hed e vuez hir. Breizad a oa da genta, Breizad e chomaz beteg e huanaden diveza. Piou a c'hallfe niveriou al leoriou, an dastumadennou, an almanagou, ar c'hantikou brezonek an euz moullet ? Ha ne oa ket eur gwir Varz anezan ? Merket eo hanoiou e oberou el levr "Breiziz 1810-1910" er bajen 95. Awalc'h a zo anezo da leunia buez daou ha tri skrivanier mad. An hini brasa hag a gemeraz d'ezan oupenn dek vloaz, eo troidigez ar Bibl Santel en eur brezonek euz ar c'houeka, skubet er-maez anezan kement gir gallek. Ar maro a zo deut da falc'hat anezan d'ar mare ma oa c'hoaz oc'h aoza eul leor gallek hag a oa gortozet gant hast gant an holl: "Cinquante ans en Bretagne". Interamant an Aotrou Ar C'hoat a zo bet graet en bourk Tremel, dimerc'her, ouspenn mil a dud o heuil an arched. Remerket an Aotrou Ar Gall, maër Tremel; ar vistri-skol; Ar C'here, avieler en Hâvr; Somerville, pastor en Tremel; Terrell, avieler en Pempoull; Ar Barzic, noter en Gwerliskin; Abraham, medidin; Delclausse, barner ar beoc'h; Geffroy, avokat, Lannuon; Jaffrennou, moulier, Keraez, etc.. Dirag ar bez, an Aotrou Scarabin, pastor en Perroz, an euz kontet buez an Aotrou Ar C'hoat, ha rener ar Bobl an euz lavaret eur brezegen evid renti enor ha justis d'ar skrivanier ha d'ar varz a oa kollet gant hon bro. |
Décès d'un véritable Breton Une triste nouvelle est parvenue aux vrais Bretons lundi: Monsieur Guillaume Le Coat, l'écrivain breton bien connu, est mort dimanche, 1er mars, dans sa mission de Tremel, à l'âge de 69 ans. Guillaume Le Coat était pasteur protestant à Tremel. Il y était né le 27 août 1845. Au cours de sa jeunesse, sa mère, fille de Guillaume Ricou, fabuliste aussi de Trémel, lui avait appris dans son école à devenir un bon bretonnant. Adolescent, il alla étudier en Grande-Bretagne auprès des protestants et une fois reçu pasteur, les "Frères de la Bible" l'envoyèrent dans le Trégor afin d'y répandre l'Evangile parmi ses compatriotes, les Bretons. Guillaume Le Coat, cela est aisément compréhensible, se heurta à des difficultés, des troubles et plus d'un se serait découragé. Mais la foi en Jésus-Christ et le courage de tenir bon lui permirent de créer à Trémel une école, un hôpital et un temple, où il exerçait son ministère. Mais cet évangéliste était surtout un bienfaiteur. En vérité, (et ceux qui le combattirent par devoir le reconnaissent largement), cet homme était bon, loyal et on ne trouvera pas trace d'une quelconque méchanceté - mais que du bien- dans les environs, qu'il aurait pu accomplir au cours de sa longue vie. Breton il fut, de sa naissance à son dernier soupir. Qui pourrait recenser les livres, les recueils, les almanachs, les cantiques bretons qu'il a imprimés ? Et n'était-il pas un véritable barde ? Les titres de ses ouvrages apparaissent à la page 95 du livre "les Bretons bretonnants, de 1810 à 1910". Son oeuvre majeure est la traduction de la Sainte Bible en un breton d'une grande pureté, débarrassé du moindre mot français. La mort est venue le faucher alors qu'il avait encore à mettre la dernière main à un ouvrage en français, attendu ardemment par tous: "Cinquante ans en Bretagne". L'enterrement de M. Le Coat a eu lieu mercredi au bourg de Tremel, plus d'un millier de personnes ont suivi le cercueil. Nous avons remarqué M. Le Gall, maire de Trémel; les instituteurs; Le Quéré, évangéliste au Hâvre; Somerville, pasteur à Tremel; Terrell, évangéliste à Paimpol; Le Barzic, notaire à Guerlesquin; Abraham, médecin; Delclausse, juge de paix; Geffroy, avocat à Lannion; Jaffrennou, imprimeur à Carhaix, etc... Devant la tombe, M. Scarabin, pasteur à Perros-Guirec, a retracé la vie de M. Le Coat et le directeur d'Ar Bobl a prononcé un discours rendant honneur et justice à l'écrivain et au barde que notre pays a perdus. |
Ar Bobl, 7 mars 1914 |
Traduction: Jean Yves MICHEL, novembre 2018 |
Paris . « Chute du Ministère Combes Quant à nous autres, les Bretons, sans distinction d’opinions, nous nous réjouirons tous de la chute de ce ministre qui a insulté si souvent notre Pays et sa langue et qui a ouvert contre les ministres du culte catholique en Bretagne l’ère de suppression de traitement sur délations anonymes. A l’heure où paraîtront ces lignes, nous espérons que Combes et les siens seront rentrés dans le néant […] Dubuisson, député de la circonscription de Carhaix, a refusé la confiance au Gouvernement Combes » |
Ar Bobl, n° 18, 21 janvier 1905 |
Le ministère Combes est renversé le 14 janvier 1905 à une faible majorité (287 députés lui sont hostiles, 281 favorables). Les 43 députés bretons se répartissent ainsi. Soutiennent le Gouvernement 8 radicaux-socialistes ; votent contre le Gouvernement 34 parlementaires, radicaux, républicains de gauche et élus de droite. Un député est en congé.
Taldir ou l'application du vieil adage:" Cent fois sur le métier remettre son ouvrage":
Langue bretonne Dans un journal qui s’intitule « les Droits de l’Homme », nous avons lu une longue étude où l’on a pour but de prouver trois choses : Que la langue bretonne a son importance Qu’elle ne favorise pas le séparatisme Qu’elle n’est pas réactionnaire » FJ |
Ar Bobl n° 326, 25 mars 1911 |
Taldir entend démontrer, une fois de plus, qu’une fraction de la gauche française, celle qui lit le journal cité dans cet entrefilet, est favorable au maintien d’une langue favorable à la République.
Jaffrennou tient à consolider la "frontière" entre gallo et breton là où ce dernier risque de reculer
Mur - Ar gann diveza En dro da Vur-a Vreiz a zo eur gann terrupl etre ar brezonek hag ar gallek. Ar brezonek a gollo abalamour da loskente bourc'hizien kear. Prestik ar Vur-ze a zo toulloc'h evid eur sil. A nevez zo, ar Person, Breizad mad, deut eun heug d'ezan dirag eun arvest ken trist, a fellaz gantan lakaat prezeg eur mission en brezonek. D'ar sarmon genta, e teuaz just pemzek a dud; en o zouez e oa eun hanter hag a zeue, heb gouzout brezoneg, gant ar c'hoant da ziski anezhan. Goude an taol-ze, e oa leusket ar brezoneg. Mur, Korlay, Lanvollon et... , n'o deuz ide a-bed euz ar garg a zo roët d'ê da viret divoulc'h iez hon Tadou. Divezatoc'h, barn ar Vretoned a vo kaled evitê. |
Mûr-de-Bretagne - Le dernier combat Autour de Mûr-de-Bretagne se livre un terrible combat entre breton et français. Le breton le perdra parce que les bourgeois le délaissent. Sous peu, ce rempart sera plus troué qu'une passoire. Récemment, le curé, un bon Breton, dégoûté par une si triste situation, s'est plu à prêcher une mission en breton. Lors du premier sermon vinrent juste quinze personnes dont une moitié, ne sachant pas le breton, voulaient l'apprendre. Après cette première tentative, le breton fut abandonné. Mûr, Corlay, Lanvollon n'ont aucune idée de la tâche qui leur est impartie de conserver intacte la langue de nos pères. Plus tard, le jugement des Bretons sera sans concession pour ces villes. |
Ar Bobl, n° 333, 13 mai 1911 |
Traduction: Jean Yves Michel, juillet 2014 |
C) Les partisans d'un compromis:
Inauguration de la nouvelle mairie de Plounénévézel
Ar Bobl, n° 431, 22 mars 1911
La Marseillaise exécutée au biniou: une belle trouvaille approuvée par le maire élu en 1908 et réélu en 1912: Youenn Mével, catholique, républicain et fidèle du Docteur Lancien, maire et conseiller général de Carhaix
Le breton « On a dit : « Le breton est une langue réactionnaire ! » Quelle erreur ! C’est en breton que je parle toujours aux gens des campagnes. Et c’est un grand plaisir pour moi d’habiller en ce langage des idées modernes, d’exposer en breton nos concepts de justice et de fraternité. Apprenez le français à nos compatriotes de Bretagne, mais n’essayez pas de détruire une langue que parle la foule immense de ces Bretons à qui Michelet décerna cette épithète : « les aînés de la Révolution » » - Georges Le Bail " |
Ar Bobl, n° 257, 27 novembre 1909 |
Le Bail (1857-1937), dit « ar bail koz », est un député radical-socialiste du pays bigouden (2e circonscription de Quimper). Ses adversaires politiques le surnommaient « ar bail kaoc’h » (le baquet à m… »).
« Les aînés de la Révolution » : Michelet fait allusion au Club breton, qui réunissait une bonne partie des députés bretons du Tiers Etat au printemps et à l’été 1789 à Paris. Ces élus inspirèrent en partie la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789.
« Le breton à l’école. Dans la Semaine religieuse, Mgr Duparc, évêque de Quimper et de Léon, invite les pédagogues catholiques de son diocèse à « compléter les matières des devoirs par une petite page de breton » » |
Ar Bobl, n° 262, 1er janvier 1910 |
Excellent bretonnant, le prélat quimpérois, originaire de Lorient, est un défenseur déterminé de l'enseignement du breton.
Carhaix - « Séance récréative à l’école communale de filles. L’assistance a eu le plaisir d’entendre le morceau breton « Bro goz ma zadou », chanté et joué au piano par deux institutrices. C’est sans doute la première fois que la langue bretonne figure au programme d’une école publique du Finistère » |
Ar Bobl, n° 345, 5 août 1911 |
Ces deux institutrices ont bravé un interdit et se sont vraisemblablement brouillées avec certaines de leurs collègues. Un des vers de ce chant dont les paroles sont de Taldir, contient en effet le vœu que la Bretagne soit libre, c’est-à-dire indépendante.
Au Congrès de l’Union Régionaliste bretonne, tenu à Gourin en septembre 1904, le député vannetais Régis de l’Estourbeillon affirme : « Le français doit rester la langue de notre esprit, le breton, la langue de notre cœur »
La Dépêche de Brest, 25 septembre 1904
A Carhaix, Taldir réclame du maire radical Lancien l'usage du breton pour les annonces municipales officielles, faites par un "tambouliner"
"Keraez - Goulen a rer perag, en eur gear vel Keraez, en kreiz Breiz Izel, lec'h a gomzer brezonek dre-holl, perag eta ne vo great an embannou nemed en gallek ebarz ar ruiou ? |
Carhaix - On demande pour quelle raison, dans une ville comme Carhaix, au coeur de la Basse-Bretagne, où tout le monde parle le breton, les annonces sont faites, par les rues, uniquement en français ? |
Ar Bobl, n° 219, 6 mars 1909 | Traduction: Jean Yves Michel, juillet 2014 |
Paris . « Chute du Ministère Combes
Quant à nous autres, les Bretons, sans distinction d’opinions, nous nous réjouirons tous de la chute de ce ministre qui a insulté si souvent notre Pays et sa langue et qui a ouvert contre les ministres du culte catholique en Bretagne l’ère de suppression de traitement sur délations anonymes. A l’heure où paraîtront ces lignes, nous espérons que Combes et les siens seront rentrés dans le néant […] Dubuisson, député de la circonscription de Carhaix, a refusé la confiance au Gouvernement Combes »
Dernière modification le 08/11/2018