Ar Bobl (1904 - 1914)

Le journal de Taldir Jaffrennou: "le Peuple"

[PNG] ArBobl_logo_100

Identifiez-vous pour accès privé

Déconnexion.

 

14/08/2023

Cette page a été recomposée le 9 octobre 2014 et complétée les 13 mars et 22 mai 2018

On verra les cas de Poullaouen, Gourin,Motreff, Berrien, Carnoët, Locarn, Trébrivan, Rostrenen, Plévin, Saint-Servais, Pluquellec

Les inventaires :

  En vertu de la loi de Séparation des Eglises et de l’Etat de 1905, ce dernier devient propriétaire des édifices cultuels et de leur contenu. Le Gouvernement Clémenceau est enclin à prêter ou louer le tout ; encore faut-il, pour éviter toute contestation ultérieure, en dresser l’inventaire : il s’agit donc, dans l’esprit du gouvernement républicain, d’une sorte d’ « état des lieux » : « La question de savoir si l’on comptera ou si l’on ne comptera pas les chandeliers d’une église ne vaut pas une vie humaine » déclara  Clémenceau, ministre de l’Intérieur du Gouvernement Sarrien, lors d’un débat à la Chambre des Députés en 1906.


     Les inventaires ont pour but de répertorier le mobilier (chandeliers, armoires, vases, bannières, bancs et chaises)  et les statues des édifices religieux ; mais sa principale raison d’être est d’établir la bonne foi de l’Etat qui ne tient surtout pas à passer pour un voleur ; ce n’est donc en rien une confiscation ; l’Etat, en tant que nouveau propriétaire et futur loueur, tient à dresser la liste de ce qu’il possède ;  il n’empêche que l’irruption d’agents de l’Etat dans les églises est  ressentie par les prêtres et les fidèles comme une atteinte à une propriété considérée par ces derniers comme privée. L’opération ne peut donc qu’engendrer des ressentiments et susciter des troubles. On tient là un casus belli.


        A Motreff, l’inventaire n’engendre, à la différence de Landeleau ou de Berrien, aucun désordre majeur. Le percepteur  ne retient que l’aspect matériel des meubles et objets : l’Esprit saint n’est qu’une « veilleuse ». .
     En devenant propriétaire du bâtiment et du presbytère, l’Etat doit s’attendre à devoir financer indirectement (subventions aux municipalités) des réparations onéreuses. 

 

La prochaine tenue des inventaires peut engendrer, parmi les fidèles un pschose: de la peur à l'esprit de résistance, de celui-ci à la méprise...

L'exemple de Plusquellec (canton de Callac)

 

Invanter Pluskellek

Skriva rer d'eomp deuz Pluskellek

Deut oun da sonjal en eur glevet kom deuz an invantoriou deuz 3 Aotrou, unan deuz Beljik ha daou deuz Franz, a zigoueaz da dremen en Plusquellek evit bizita hon mereriou var dro ar 15 a viz c'houerver divezan. An dud-ma a zo tud a fe vad hag a antreaz en iliz Pluskellek evit pedi  an Itron Varia-C'hras.

   An dud pa glevjont a oa Aotrone en iliz a lavaraz an eil d'egile :"Erru eo an invantourerien. Damp d'ê, ha kemeromp peb a venvek". Darn a gemera eun tranch, darn eun hach, ha pephini evel ma c'halle. Mez unan a laraz a oa tud o pedi ha n'o devoa intantion fall -a-bed a-enep an Iliz.

 L'inventaire à Plusquellec

  On nous écrit de Plusquellec:

Nous sommes pris de peur lorsque nous entendons parler, à propos de l'inventaire, de trois Messieurs, l'un Belge, les autres Français, qui vinrent se promener à Plusquellec afin de rencontrer nos paysans, aux alentours du 15 février dernier. Ces personnes de bonne foi entrèrent dans l'église de Plusquellec pour y prier Notre-Dame de Grâce.

  Les fidèles, quand ils connurent la présence de ces Messieurs dans l'église se dirent: "Les préposés à l'inventaire sont arrivés. Courrons-leur sus et que chacun prenne un outil". Les uns saisirent une tranche, d'autres une hache, d'autres encore ce qu'ils purent trouver.

  Mais l'un d'eux avoua que ces personnes en prière ne nourrissaient aucune mauvaise intention à l'encontre de l'Eglise.

Ar Bobl, 10 mars 1906 Traduction: Jean Yves MICHEL, mai 2018

 

 

Un inventaire opéré par la municipalité rouge: 

A Poullaouen, le secrétaire de mairie et le maire prennent les choses en main.

Il est vrai que le maire avait interdit officiellement la quête de beurre dans la commune en 1904..


 Poullaouen – L’inventaire de l’église
    « H. Hourmand, adjent-maër, a rea orezenou dirag imach ar Verc’hez epad ma reer an invanter ar skreteri. Ar maër hepken a zeblante beza eürus”
« H. Hourmand, adjoint au maire, faisait ses oraisons devant l’image de la Vierge pendant que le secrétaire (de mairie) procédait à l’inventaire. Seul le maire faisait semblant d’être satisfait »
Ar Bobl, n° 78, 17 mars 1906

 

Un inventaire par la force en  présence de l'armée: Gourin


[PNG] Gourin inventaire chasseurs Pontivy 600 png

 

 

[PNG] inventaire Gourin 600

 Le recteur désemparé, devant la porte défoncée de l'église

 

  L'utilisation de l'armée (le 4e régiment de chasseurs de Pontivy) pour forcer la porte des églises, à Gourin

 

En Gourin eo bet great an ivanter dimeurz. Red eo bet kas 300 soudard ar varc'h ha 80 jandarm evit gallout ober al labour divalo-ze.

Da seiz heur, sousprefet Pondi a erru hag a lak daou brizionier  da vrizilla an noriou. Er c'heit-ze soudarded a harze deuz an dud da dostaad d'an iliz. Ar person a lennaz eul lizer a enebiah dirag an nor hag a lavaraz penoz ma blegfe nemed d'an nerz. Goude-ze ar Maër a reaz eur brezegen gaër hag a lakeaz an dud da straka o daouarn.

   Vel ma  oa skuiz ar galeourien o vrizilla an noriou, an ajant-voyer a lakeaz klask tri gantonier evit echui al labour. Daoust hag al lapous-ze a zonj d'ezan a oa ar gantonierien er memez renk gant ar brizonierien a gomzemp araok ?  A-benn teir heur labour a c'hallaz ar paour kez Kantonier digerrian an nor. Evit echui, an Aotrou person en deuz trugarekeet ar gristienien

A Gourin, l'inventaire a été dressé mardi. Il a fallu mobiliser 300 soldats à cheval et 80 gendarmes pour pouvoir accomplir ce détestable travail.

 A sept heures, arrivée du sous-préfet de Pontivy qui utilise deux prisonniers pour mettre en pièces les portes de l'église. Pendant ce temps les soldats empêchaient les gens de s'en approcher. Le recteur lut une protestation devant le porche et déclara qu'il ne céderait qu'à la force. Ensuite le maire fit un beau discours, fort applaudi.

 Les "galériens" étant fatigués, un agent-voyer fit appel à trois cantonniers pour achever le travail. Quelle cervelle d'oiseau a pu imaginer que des prisonniers étaient les égaux des cantonniers ? Il fallut trois heures au pauvre cantonnier pour ouvrir les portes. A la fin, le recteur remercia les chrétiens qui s'étaient déplacés.

 Ar Bobl, n° 77, 10 mars 1906
 Traduction: Jean Yves Michel, janvier 2013


- Un inventaire ne s'étant heurté qu'à une résistance symbolique, en dépit de l'ire du recteur...  Motreff


Motreff   - « An invanter e-barz Motreff    Kontroller Karez a zob et oc’h ober invanter iliz Motreff digener. Eur bobl tud a oa en iliz, mez tout e oant sioul. An aotrou person en deus leset eul lizer o enebiezh e-keid ma rea ar c’hontroller e vicher. An dud a lavare ar rosera ha Joson Vincent en deuz kanet ar Miserere mei hag ar Parce Domine » « L’inventaire à Motreff – Le percepteur de Carhaix est venu jeudi procéder à l’inventaire (du mobilier) de l’église de Motreff. Une foule de gens y assistait  dans le plus grand calme. M. le curé lut une lettre de protestation pendant que le percepteur était à l’œuvre. L’assistance récita le rosaire et Joson Vincent chanta le Miserere et le Parce domine » .
Ar Bobl, n° 74, 17 février 1906 Traduction: Jean Yves Michel, octobre 2012

 

   L'instituteur public se refusa à assister à l'inventaire. Il se justifia auprès de l'Inspecteur primaire par le raisonnement suivant: s'il avait affronté ouvertement une municipalité et  une population cléricales , l'école laïque de Motreff, déjà fragile, aurait eu à pâtir..


 Ensuite, des inventaires ayant tourné à la confusion du représentant de l'Etat:

Berrien, d'abord...


Berrien – L’inventaire de l’église
     « A person a revusaz lezet  paotr an invanter d’antreet. Heman a guitaaz neuze e-pad ma huche eur bern tud : « Vive la liberté ! » »
 « Le curé refusa l’entrée de l’église à l’homme chargé de l’inventaire. Celui-ci quitta alors les lieux tandis qu’une foule de gens criait : « Vive la liberté ! »
Ar Bobl, n° 77, 10 mars 1906 Traduction: Jean Yves Michel, octobre 2013

 

 

Carnoët

 

Ivanter an iliz

En Karnoët eo bet esaet ober ivanter an iliz dimeurz. Dustu ma oa gwelet paotr an ivanter hag ar jandarmed oc'h antreal er bourk e oa sonet ar c'hloc'h hag ouspenn 200 a sud a ziredaz dirag an iliz. An Aotrou Olichon, person, a revuzaz lezel ober an ivanter hag a lennaz eul lizer a enebiac'h.

  E-pad ma lenne e lizer unan euz ar jandarmed a zeblante ober goap deuz ar c'hatoliked a oa aze. Avansamant vo roet d'ezan.

 

Inventaire de l'église

Mardi un inventaire de l'église a été tenté. Aussitôt que le préposé à l'inventaire et les gendarmes furent aperçus à l'entrée du bourg, on sonna la cloche et deux cents personnes accoururent autour de l'église. M. Olichon, recteur, refusa la permission d'opérer et lut une lettre de protestation. Pendant cette lecture, un des gendarmes semblait se moquer des catholiques présents. Il aura de l'avancement.

Ar Bobl, n° 77, 10 mars 1906 Traduction: Jean Yves Michel, septembre 2013

 

Carnoët, encore

 

Karnoët

An ivanter a zo bet disadorn 21 a viz meurz goude kreizde. Var dro div heur oa gwelet eur wetur, ha daou aotrou ha daou archer enni, oc'h erruoui er bourk d'ar pevar lam ru. Merc'hed ar zakrist a c'haloupaz kerkent da breveni ar person. Ar c'hure hag eur bochad kristienien en em zastumaz en iliz hag a brennaz an noriou, rag kredi a reet e oa erru paotred an ivanter hag an dizmantr.

Er c'heit-ze tud all a oa eat en tour hag en em lakaz da zon ha da dintal ar c'hleier. An dud o klevet an taoliou galv a ziredaz ouspenn pemp kant anê, d'ar bourk, evit difen o iliz parroz deuz al laëron. Pa welaz an daou jandarm hag o daou gevarek ne oa ket a voïen d'ezo da vond en iliz na de vrao na dre nerz, e pignchont en o gwetur hag iô kuit. An holl a hope var o lerc'h:" bevet al liberté ! Bevet an Aotrou Doué !".

  Mar ar maër a oa o krial :"A bas la calotte, hou !". Ar ruien all a oa eat da goach.

 Carnoët - Un inventaire a pris place samedi 21 mars après-midi. Vers deux heures, on vit un voiture contenant deux messieurs et deux gendarmes entre à toute vitesse dans le bourg. La fille du sacristain s'empressa de prévenir le recteur. Le vicaire et une troupe de chrétiens se réunirent dans l'eglise, en fermèrent les portes, car ils croyaient que le préposé à l'inventaire venait pour tout détruire.

    Pendant ce temps, d'autres personnes montèrent dans le clocher afin de sonner les cloches. Ceux qui entendirent le tocsin se retrouvèrent bientôt à plus de cinq cents au bourg afin de défendre leur église paroissiale conte les voleurs. Lorsque les deux gendarmes et les deux fonctionnaires s'aperçurent qu'il leur était impossible d'entrer, de gré ou de force, dans l'église, ils grimpèrent dans leur voiture et s'en furent. Ils furent hués aux cris de "Vive la liberté ! Vive Dieu !". Le fils du maire criait: "A bas la calotte, hou !". Les autres rouges étaient allés se cacher

 Ar Bobl, n° 80, 31 mars 1906
 Traduction: Jean Yves Michel, novembre 2013

 

Saint-Servais

Invanter Sant-Servez

En Sant-Servez, d'ar iaou 7 a veurz, e oa an invanter war iliz ar barroz. A-dalek dek heur hanter eun niver braz a gristienen a oa diredet d'ar bourk. D'an eur laret, paotr ar Gouarnamant harpet gant daou archer, a erruaz dirag ar porc'hed. Goude beza klevet an Aotroou Person o lenn d'ezan eur gaër a eneben al lezen, ha dirag dorojou serret an iliz, an aotrou kez a dec'haz, mezek eun tam deuz ar vicher divalo, aotreet d'ean gant Gouarnamant Bro C'Hall.

  Neuze an Aotrou Person a drugarekeaz e barrozianiz euz o fe grenv hag eur ar galon vad e tiskuellent en kenver oc' iliz koz.

  E keit-ze, eun toulladik falz-kristenien, badeet koulskoude en iliz Sant-Servez, a c'hoarze hag a zeblante goapat an dud kalonek deut da zifenn o c'hredennou.

Mez ha mez d'ê, o goaperez a gouezo warno o-unan ha war o zud !

L'inventaire à Saint-Servais 

A Saint-Servais, le jeudi 7 mars, avait lieu un inventaire de l'église de la paroisse. Depuis 10 H 30, un grand nombre de chrétiens étaient accourus au bourg. A l'heure fixée, l'agent du Gouvernement, flanqué de deux gendarmes, arriva devant le porche. Après avoir écouté le recteur lire une diatribe dirigée contre la loi et constatant la fermeture des portes de l'église, le pauvre homme s'en alla, quelque peu honteux de la tâche déshonorante que lui avait confiée le Gouvernement français.

    Alors le recteur remercia les paroissiens de la solidité de leur foi et du courage qu'ils avaient témoigné à l'égard de leur vieille église.

   Pendant ce temps, une petite bande de faux-chrétiens, qui avaient été cependant baptisés dans cette église, riaient et semblaient se moquer des gens courageux venus défendre leurs croyances.

Honte et honte sur eux, vos moqueries retomberont sur vous et les vôtres !

 Ar Bobl, 17 mars 1906  Traduction: Jean Yves MICHEL, 13 mars 2018


 

Locarn, Trébrivan, Rostrenen...

 

 En Lokarn hag en Trabrian eo bet great an ivanter. Eur bern tud a oa deut da enebi deuz paotr an ivanter. Maër Lokarn a oa eat da Drabrian da welet an ivanter. Pigna a reaz var eur voger evit ober eur brezegen, mea n'hellaz ket komz rag an dud a huche varnan.

En Rostrenn, eo bet serret nor an tour var paotr an ivanter. Red eo bet terri eur prenestr evit permetti d'ezan dond er meaz. Er c'heit-ze, an dud a huche varnan

A Locarn et Trébrivan l'inventaire a eu lieu. Une folue de gens était venue s'opposer à l'homme de l'art. Le maire de Locarn étéit venu à Trébrivan assister à l'opération. Grimpé sur un mur, il voulut prononcer un discours mais ne put parler, car les gens le huaient.

A Rostrenen, le préposé à l'inventaire fut enfermé dans le clocher et il fallut casser un vitrail pour lui permettre de sortir, sous les huées. 

 Ar Bobl, n° 77, 10 mars 1906
Traduction: Jean Yves Michel, octobre 2013

 

Plévin, ensuite...


Ivantor iliz Plevin

Eun neubeud deiou zo eo bet ivantoret iliz Plevin. Eun Aotrou gwisket a zoare, savet kollier e vantell, a antrez er presbitor hag a zortiaz dustu . Digerri a reaz ar gril houarn a ro var ar vered, hag ec'h eaz en iliz. [...] Souden, ec'h aretaz, eun den a oa var bennou e zaoulin eno e pedi Doue. "Malloz, emean, me gava d'in e vijen bet ma-unan opc'h ober an ivantor ha setu eun den deut d'am direnka". Hag heb ober trouz hag hen lived fall e troaz dre dreon ar pillerou-mein hag e antreaz er sekretiri.

   "Hallo, emean, d'al labour ha buan !". Checha a reaz eun direten deuz eur gomoden a oa eno, hag e kavaz ennhi eur bern dillad pleget. Merka a reaz var e gaier:" Eur roched perkal, eur roched mouslin, eur roched batist". En eun tiretenn all e kavaz mezer alaouret ha arc'hantet, teir mantell divanch arc'hantet, diou vantell divanch griet gant aour, eur servieden vrec'h alaouret. En eur derved tireten e kavaz eur garg goulou koar, kantouellerou, buredou, etc...  Eun armel all ne oa ennan nemed eun tammig "boest" (eur pod-ezans) arc'hant hag a zigore dre an daou du. Pebez souez ! Ebarz e oa eun espes ludu griz. Da genta e kredaz e oa butun malet e oa, mez ben fin e reaz eur sonj all. An den daoulinet en iliz a zeuaz en e vemor: "Klaoustre, emean, hennez a neuz laket poultr er vouestr-ma da strakal" - Hag hen a skuill eur brizen euz ar poultr var al leur-gambr, ha tostaat eun alumetezen.

Raktal, eur vogedenn deo a zavaz en ear, hag a reaz koumoul tro var dro d'ean. Ganthi e oa eur c'houez dilisius, c'houez vad ar balsam ha potr an taillou zantaz e galon leun a lawenidigez. Hag hen adarre d'e labour skriva. Eur pres a chome da zigerri. Er meaz hennez e tennaz eur bakaden zu hag e oa dispaket gantan linsel ar vaz kaon. "Marvat, eme an Aotrou, hema zo eun "tapiz" bennag !". Mez dre ma displege an danve e wele warnean poltred daërou, eskern kroazet hag er c'hreiz... eur pez Penn-Maro, hag a zelle dioutan gant daoulagad goulanteer evel da c'hopal d'ean: "Maleüruz ! Perag e teuez da derri peoc'h santel iliz Doue ? Perag e teuez, gant da zaouarn dizakr, da labea linsel an Anaon ? ".

An Aotrou a ginnigaz sempla var ar plas. Oh ! An daoulagad-ze, an ginou-ze hag a oa dizantet hag a c'hoarze- ind, an dioufronn-ze hag a oa toull !

Na c'houllaz ket chom amploc'h da zellet... rag eur spont marvel a oa antreet en e galon, na ouïe penoz. Ar penn-ze, en despet d'ean, a sklaze e wad d'ean hag hen galoupat er-meaz ar sekreteri, er-meaz an iliz. Pa oa o tremenn, e kredaz gweled an hini a oa daoulinet var greiz ar pave osellet outan gant selloa goapeüz.

Pa oa arru er gear deuz an noz, e vreg a c'houllaz  digantan hag hen ne oa ket bet a drouz e-pad an ivantor.

-"Nan, emean,  ...mez a Maro a meuz gwelet a dost".

An Teo

L'inventaire de l'église de Plévin

Il y a quelques jours a été dressé l'inventaire de l'église de Plévin. Un Monsieur, vêtu comme il faut, portant manteau à col, entra au presbytère et en sortit tout de suite. Il ouvrit la grille de fer qui entoure le cimetière et pénétra dans l'église. Soudain, il s'arrêta: un homme agenouillé était en prière. "Malheur, se dit-il, je croyais être seul pour dresser l'inventaire et voici un individu qui va me déranger !". Et, sans faire de bruit, mais blanc comme un linge, il contourna le pilier et entra dans la sacristie. "Allons-y, au travail, rapidement !". Il ouvrit un tiroir de commode et y trouva un grand nombre de vêtements pliés.  Il nota sur son carnet: "un surplis de percale, un surplis de mousseline, un surplis de batiste". Dans un autre tiroir, il trouva un drap d'autel brodé d'or et d'argent, trois chapes brodées d'argent, deux chapes brodées d'argent, une étole brodée d'or. Dans un troisième tiroir, il trouva un gros paquet de bougies et cierges, des chandeliers, des burettes, etc... Une autre armoire ne contenait qu'une "boîte" (un encensoir) en argent qu'il ouvrit sur les deux côtés. Quel étonnement ! A l'intérieur, une espèce de cendre grise. D'abord, il crut qu'il s'agissait de tabac moulu finement, mais au bout d'un moment lui vint une autre idée. Il se remémora l'individu  dans l'église: "Je parie, se dit-il, que cet homme a rempli cette boîte de poudre à éclater". Il en versa une partie sur le sol de la sacristie et en approcha une allumette. Aussitôt, une épaisse fumée s'éleva dans l'air en nuages autour de lui. Il en émanait une odeur délicieuse, celle de l'embaumement et le coeur du percepteur s'emplit d'allégresse. Il se remit au travail. D'une armoire encore fermée, il retira un paquet; défait, il contenait le drap mortuaire du catafalque. "Certainement, dit le Monsieur, ceci est un tapis quelconque !". Mais quand il eut déplié l'étoffe, il y vit des figures de gens en larmes, des os en croix et dans le milieu une grande tête de mort qui le regardait de ses yeux vides, comme pour lui crier: "Malheureux ! Pourquoi es-tu venu détruire la paix de cette sainte église de Dieu ? Pourquoi es-tu venu abîmer, de tes mains impies, le linceul des morts ?". Le monsieur fut sur le point de défaillir sur place. Oh ! ces yeux, ce visage édenté qui se rit de moi, ces narines qui ne sont plus que des trous !

Il ne voulut pas regarder plus longtemps: la peur de mourir s'était emparée de lui il ne savait comment. Parvenu à cette extrémité, à son grand dépit, son sang ne fit qu'un tour et il s'enfuit à toutes jambes de la sacristie et de l'église. En sortant, il crut voir l'individu agenouillé au milieu du pavage, lui jeter un regard moqueur.

  A son arrivée chez lui dans la soirée, son épouse lui demanda si l'inventaire n'avait pas fait de bruit. "Non, dit-il, mais j'ai vu la mort de près".

Ar Bobl, n° 114, 1er décembre 1906

 Traduction: Jean Yves Michel, mai 2014

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 







Dernière modification le 23/05/2018

Site motorisé par ZitePLUS 0.9.1