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b) Des progrès agricoles réels mais ténus..
Taldir affiche son optimisme:
"En 1890, les fermiers sortent annuellement quatre boeufs; maintenant, ils en sortent huit, plus lourds, de meilleure qualité. La production de blé a été multipliée par 7 en quinze ans"
Ar Bobl, n° 32, 29 avril 1905
Dans le petit entrefilet ci-dessous, Taldir se réjouit du succès remporté par des animaux élevés, l'un au Moustoir par Joseph Le Norgant, l'autre à Kergloff par François Conan..
"Keraez- Nos boeufs gras. Ce nest pas sans raison que la cité de Carhaix, capitale du Poher, blasonnait "de Boeuf passant de sable". Il n'est pas de région, en Bretagne, où l'on élève d'aussi magnifiques animaux de boucherie. Le Boeuf Gras qui figurait à la grande cavalcade qui a eu lieu lundi dernier 28 mars à Douarnenez, pesait exactement 2040 livres et avait coûté 980 francs. Il sortait des étables de M. Joseph Norgant, l'estimable maire du Moustoir, canton de Maël-Carhaix, l'un des lauréats du récent concours agricole. Un taureau de plus de 1500 livres, qui figurait également à la sus-dite cavalcade de bienfaisance, avait été acheté à notre ami François Conan, agriculteur Kergloff". |
Ar Bobl, 2 avril 1910 |
Il est très facile de croître à partir d'un niveau initial très bas...
"Ne parlez plus de l'extrême misère des paysans bretons. Je vous garantis que c'est là un vieux cliché [...] Jamais nos paysans ne furent plus à l'aise. On trouve même une majorité de propriétaires à la Feuillée, Brennilis et Loqueffret où ils étaient tous chiffonniers il y a un siècle"
Ar Bobl, n° 186, 18 juillet 1908
Le cheval breton est l'un des fleurons de l'élevage centre-breton depuis le 18e siècle:
"Le cheval de trait de l'intérieur des terres et de la côte Sud du Finistère, tout en étant très trempé, ne bénéficie pas d'un élevage aussi soigné et une nourriture plus rare ne lui permet pas de se développer autant. Carhaix et le Morbihan font un petit trait trapu, très fort et vigoureux, qui conviendrait admirablement à la remonte de l'artillerie japonaise. Sa rusticité et son tempérament de fer seraient le meilleur garant de son acclimatement. D'un prix beaucoup moins élevé que les produits du Nord-Finistère, il a comme marge entre 000 et 1 000 francs, mais à ce dernier taux on le choisit". |
Ouest-Eclair, 1er janvier 1911 |
Commune pauvre de l'Arrée, Botmeur abrite des paysans-chiffonniers. On perçoit sur le graphique ci-dessus une augmentation, peu spectaculaire mais réelle, des ressources fiscales communales. La croissance démographique, très faible, ne peut seule expliquer cette évolution des rentrées d'argent. Il faut qu'il y ait eu enrichissement de quelques habitants par une agriculture plus rentable (taxe sur les propriétés non bâties) ou par d'heureux voyages pédestres d'affaires. Et puis, il y a les profits retirés de la vente de la tourbe extraite des marais du Yeun Elez. Surtout, le prix du blé est rémunérateur. On remarquera que l'un des quatre impôts datant de la Révolution, la contribution sur les portes et fenêtres, est en vigueur plus d'un siècle après sa création. L'argent gagné par le commerce ambulant est souvent investi dans la pierre (agrandissement de la maison, donc du nombre d'ouvertures).
La "première révolution verte", dont il ne faut ni surestimer, ce que fait Taldir, ni sous-estimer, ce que n'hésitent pas faire les historiens marxistes, les résultats, est une "révolution par le haut", c'est-à-dire conçue et organisée par les notables locaux qui ne travaillent pas eux-mêmes la terre, mais en vivent. Il s'agit de sortir du "Moyen-Age agricole": agriculture à bras, rendements céréaliers dérisoires, emprise gigantesque de l'inculte et de la jachère, subordination de l'élevage aux céréales pauvres.
Produire davantage en augmentant la superficie cultivée: c'est la révolution quantitative.... Les landes sont défrichées à coups de "grandes journées" collectives. Produire mieux: c'est la révolution qualitative. Les céréales pauvres reculent au profit de l'avoine et du froment. Et à la Feuillée, les moutons du début du 19e siècle font désormais place aux chevaux et aux bovins...
La pomme de terre remplace lentement dans l'écuelle de bois la galette de sarrasin et permet d'écarter le spectre de la famine.
On s'essaie aux plantes fourragères, trèfle, betteraves, choux qui permettent de nourrir quelques bovins supplémentaires et on fait venir de l'amendement marin naturel (sable coquillier ou maërl) par voie d'eau (le canal de Nantes à Brest) ou rail, car le réseau routier est souvent dans un état déplorable.
La gare de Carhaix. Voie métrique unique. Le plein d'eau pour la locomotive du train de marchandises à droite. Train de voyageurs à gauche (destination: Châteaulin)
La voie ferrée renforce l'activité économique du Poher et, surtout, de Carhaix
"LA GRANDE FOIRE DE MARS. Elle a été favorisée par un temps magnifique et a eu un succès sans précédent. On y a compté 1200 chevaux, 700 boeufs, autant de vaches, 120 veaux et moutons, plus de 700 porcs gras et autres et plus de 200 volailles. Il y a eu beaucoup de transactions, surtout sur les pouliches et les chevaux hors d'âge; les boeufs gras avaient un vente assez difficile, mais beaucoup de vaches et de bouvillons ont été vendus, ainsi que des cochons gras. La gare de Carhaix a expédié 50 wagons de bestiaux dans diverses directions et le samedi précédent elle en envoyait encore une douzaine d'autres, soit environ 500 animaux exportés" |
Ouest-Eclair, 16 mars 1910 |
La ligne de chemin de fer départemental Rosporden-Plouescat, qui passe par Châteauneuf et la Feuillée, est mise en service en 1912... De ce fait, Châteauneuf possède deux gares: celle des chemins de fer armoricains, au premier plan; celle du Réseau breton, à l'arrière-plan.
Ar Bobl, n° 418, 21 décembre 1912 - Les horaires du chemin de fer départemental Nord-Sud
Ci-dessous, les horaires d'une voie ferrée complétant la toile d'araignée centre-bretonnel
Deux heures pour accomplir quelques 35 km....
Ar Bobl, 18 mai 1907
En dépit d'accidents de parcours....
"DERAILLEMENT. Un déraillement vient de se produire en gare de Gourin. Le premier train, allant de Carhaix à Rosporden, entrait en gare à très petite vitesse fort heureusement, lorsqu'au passage de l'aiguille, la locomotive sortit des rails, entraînant à sa suite tous les wagons du train. Un cri d'effroi retentit parmi les voyageurs, qui se hâtèrent de sauter sur la voie. Deux wagons de marchandises étaient renversés; personne, heuresement, n'était blessé; les voayageurs en avaient été quittes pour la peur. Un train de secours a été envoyé de Rosporden, mais toute la journée, les trains ont subi des retards assez importants. Une équipe d'ouvriers, du dépôt de Carhaix, est occupée à remettre la voie en état. Une enquête est ouverte: il semble que c'est une fausse manoeuvre de l'aiguilleur qui a causé cet accident". |
Gourin: entrefilet du "Journal de Pontivy et de son arrondissement", daté du 10 janvier 1904 |
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Le "port" de Gouarec. Le canal de Nantes à Brest avant qu'il ne soit coupé par l'usine hydro-électrique de Guerlédan. La symbiose rail-batellerie (1912). Déchargement d'une péniche venant de Nantes....dont la cargaison sera acheminée vers Carhaix et Châteaulin..
Le "hub" (plateforme de transport multi-modal) de Port-de-Carhaix:
Le paysan s'habitue à vendre du beurre (très salé) et surtout du blé, et, la loi protectionniste (1892) du Gouvernement Méline aidant, à revendiquer un prix de vente minimal.
Cependant, les rendements demeurent médiocres, les paysans modernistes l'exception....
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Battage de la moisson à Langonnet: utilisation d'une "locomobile" à vapeur pour mettre en mouvement la batteuse
L'hebdomadaire morlaisien "L'Echo du Finistère" (1905-1912) rapporte avec enthousiasme un événement prenant place à Plouguer (n° 41, 15 septembre 1906)
Quelques signes avant-coureurs d'un tardif décollage technologique. Si la batteuse mécanique actionnée par une lourde machine à vapeur reste l'exception, le manège à battre, que l'on aperçoit à gauche, a diminué la peine des batteurs de blé. Les gerbes de blé descendent gràce à un tobbogan, le lien coupé et les tiges munies de leurs épis sont jetées sous les pieds des chevaux... L'aire à battre doit être la plus propre possible...
Une des activités essentielles des gros bourgs de Haute-Cornouaille: l'artisanat et le commerce...
Le mari tient la forge, fabrique des roues de tombereau ou de char-à-banc, mais essaie de placer des machines agricoles: charrue à brabant double, semoir, et, de temps à autre, une faucheuse-lieuse. L'épouse vend casseroles, brocs, assiettes, cafetières, lampe à pétrole....
Gourin: la venue du chemin de fer (ici, ligne Carhaix-Rosporden) favorise l'apparition de commerces (façade à armature de bois, percée de deux vitrines de part et d'autre d'une porte d'entrée centrale, protégée de la pluie par un étroit auvent). Ecoulement des eaux de pluie et de lavage à ciel ouvert. Trottoirs à la charge des riverains. Au premier, l'appartement des commerçants; à l'étage, sous les combles et derrière les capucines, les chambres des bonnes et des apprentis-hommes de peine...
Comme ici, à Guémené-sur-Scorff (Morbihan), le marché hebdomadaire, aussi sommaire soit-il, condtitue toujours le point de rencontre entre campagnards et habitants du bourg. Les uns comme les autres sont à la fois acheteurs et vendeurs. Les "circuits courts" sont à peu près les seuls utilisables...
Ici, à Gouarec (Côtes-du-Nord), le marché est couvert, comme, du reste au Faouët (Morbihan). Il a fallu de l'audace aux municipalités du lieu pour entreprendre la construction en bonne pierres de halles et des écoles primaires publiques.
Dernière modification le 04/03/2019